Le choix des prénoms

Le choix des prénoms

Baptiser un personnage est une étape importante, à ne surtout pas prendre à la légère, surtout quand il s'agit de ses héros et héroïnes. Un nom caractérise une personne et chaque prénom ou patronyme est porteur de sens à part entière.
            Choisir un prénom parce qu'on l'aime bien ou au hasard est une erreur très fréquente chez les jeunes auteur.e.s.
            Prénom et patronyme racontent une histoire par eux-mêmes. Ce sens, cette histoire véhiculés par les prénom et patronyme vont nourrir la personnalité et la caractérisation du personnage. Ils vont donner des indications sur son origine ethnique, sur son âge (dans certains cas), sur son milieu culturel, ou encore jouer sur la symbolique, quand il n'est tout simplement pas un indice de son destin ou de son passé. Vous-même, en tant que lecteur.ice, vous vous ferez une représentation immédiate (et inconsciente) d'un personnage juste en découvrant son nom sur la page du livre, et cette représentation sera très différente selon que vous lisiez les noms de Marie Guilbaut, Joaquim Moralès, Jean-Baptiste Adamsberg, Aya de Youpougon, Severus Rogue, Kate Sharma, ou encore Aral Vorkosigan.
C'est pourquoi prendre du temps pour définir l'identité de son personnage est crucia
l.

L'auteur Steve Berry a une héroïne qui s'appelle Cassiopée Vitt. Je l'ai découverte dans la saga des Cotton Malone où elle a un rôle secondaire récurrent. Quand j’ai lu ce nom la première fois, j'ai tout de suite imaginé une femme à la peau pâle et aux cheveux clairs parce qu'il s'agit d'un patronyme à consonance flamande ou germanique. Je fus estomaquée de découvrir qu'il s'agit d'une Espagnole ! Je ne comprends toujours pas ce choix de la part de S. Berry et ça continue de me déranger chaque fois que je lis un de ces romans parce que ça crée une dissonance cognitive.

Dans la nouvelle (Im)pulsion (publiée dans le recueil Les orageuses), j'ai beaucoup tiqué sur le personnage masculin qui répond au nom de Junior ... lorsque j'ai découvert que son nom complet est "Richard Dupuis Junior". L'apposition de ce très anglo-saxon "Junior" avec un patronyme inversement très franco-français a créé un bon bogue dans mon cerveau. La nouvelle étant issue de l'univers de la saga Paris des Limbes (que je n’avais pas lue), j’ai présumé que l'explication est donnée dans le roman. L'autrice, CeeCee Mahon, m'a indiqué que ce Junior représente le fait que c'est un fils à papa (pourri gâté) dans une famille snob. Ça se tient ...  Mais vous voyez la puissance du nom dans l'appréhension que les lecteur.ice.s ont des personnages.

Même si cela ne s'y prête pas toujours, je trouve intéressantes les identités qui jouent sur une symbolique. Dans sa saga de fantasy urbaine La coureuse des grèves, Mélanie Dufresne met en scène un homme du nom de Zacharie Morgan. Il s'avère que celui-ci est un cheval-bâtisseur. La légende québécoise du cheval-bâtisseur est étroitement liée à l'église et la religion, c'est pourquoi le personnage est doté d'un prénom très biblique sans être archaïque ! Et son patronyme, Morgan, vient d'une race de chevaux de selle américain. C'est un personnage dont la carte d'identité révèle très bien son patrimoine culturel et "magique" !

Dans sa (magistrale !) pièce de théâtre Variations énigmatiques, Éric-Emmanuel Schmitt a nommé un de ses deux personnages Abel Zorg : de A à Z, cela indique que ce personnage incarne l’alpha et l’oméga de l’introspection, de la réflexion à soi (thèmes abordés dans la pièce), mais aussi de l’histoire racontée.

Avez-vous des personnages dont vous avez choisi le nom pour des raisons bien spécifiques ? Quel soin apporterez-vous à la recherche des noms de vos prochains personnages ?

 

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Dans l'atelier Autopsie d'une nouvelle (qui se déroule les 27 février et 7 mars 2024), je vous explique de quelle manière j'ai baptisé mes trois personnages de la nouvelle L'échappée et pour quelles raisons j'ai choisi les prénoms Justin, Zohra et Amir.

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